L’école des Affaires publiques de Sciences Po ouvrira dès la rentrée prochaine une filière Sécurité-Défense. A cette occasion, Sciences Po Défense et Stratégie revient avec Guillaume Farde, managing partner chez ALTHING Sécurité et Intelligence économique et conseiller scientifique de la spécialité sécurité-défense de l’Ecole d’affaires publiques, sur les enjeux de la création de cette filière.
Quelles sont les mutations actuelles du secteur de la sécurité et de la défense ?
Le secteur de la sécurité et de la défense est aujourd’hui traversé par trois grandes mutations.
Nous faisons tout d’abord face à l’intensification de certaines menaces, le terrorisme notamment, et à l’apparition de nouvelles menaces telles que le cyberterrorisme et la cybercriminalité. Le champ de bataille du XXIème siècle est, sans conteste, numérique.
En deuxième lieu, une autre mutation est celle de l’émergence d’un continuum entre les questions de sécurité et les questions de défense. Ce continuum est matérialisé par la coopération étroite, devenue régulière, entre les acteurs publics civils et militaires dont la manifestation la plus emblématique est probablement l’Opération Sentinelle. Ces interactions nouvelles entre les acteurs de la sécurité et de la défense entraînent des évolutions institutionnelles, juridiques et opérationnelles qui concourent dès aujourd’hui à la fondation du modèle de sécurité et de défense français de demain.
En dernier lieu, la mutation actuelle du monde de la sécurité et de la défense entremêle les enjeux publics et privés au point de faire de ces deux secteurs, deux hémisphères d’un seul et même monde. Alors que ces deux hémisphères ont longtemps été présentés comme deux mondes contraires, leur rapprochement en un seul et même monde est une transformation absolument majeure. Le monde de la sécurité et de la défense enfin réunifié recrute de façon importante et les jeunes professionnels qui le rejoindront auront une carrière faite d’aller-retour d’un hémisphère à l’autre. L’ambition de la spécialité est de les y préparer en faisant de leur employabilité à la sortie un principe cardinal.
Pourquoi créer une spécialité Sécurité et Défense au sein de l’École d’Affaires publiques ?
C’est la conséquence d’une double expression de besoins : le besoin des employeurs du secteur et celui des étudiants de l’École d’Affaires publiques eux-mêmes.
Sur le besoin des employeurs, l’évidence est que les mutations que j’exposais précédemment créent des besoins en jeunes cadres supérieurs qui sont d’excellents généralistes des questions de sécurité et de défense, capables de s’adresser aussi bien à des fonctionnaires qu’à des militaires, des ingénieurs ou des agents privés de sécurité. Jusqu’à présent, ce type de formation n’existait pas et les besoins des recruteurs étaient comblés par des jeunes diplômés qui n’avaient abordés – souvent en profondeur du reste – qu’un seul aspect des questions de sécurité et de défense. Notre ambition est de former des étudiants complets, des sortes d’Hommes de Vitruve de la sécurité et de la défense si vous me permettez cette métaphore.
Sur le besoin des étudiants, le constat est que les cours proposés jusqu’à présent au sein de Sciences Po étaient tournés uniquement vers les “War Studies”. Depuis plusieurs années, leur demande pour des cours plus professionnalisants et davantage tournés vers la France justifiait pleinement la création d’une spécialité qui se différencierait des masters existants exclusivement juridiques ou géopolitiques.
La filière formera des jeunes cadres généralistes qui veulent s’orienter vers le secteur public (Saint Cyr, Commissaire aux affaires maritimes, DGSE, DGSI…) mais aussi vers le secteur privé (les directions sûreté des groupes du CAC40, les entreprises de sécurité et de défense, les industriels du secteur de la défense et de la sécurité, les cabinets de conseil en sûreté…).
Quelles sont les spécificités de cette spécialité ? Comment se déroule le programme ?
Fidèle à la tradition des affaires publiques, la spécialité s’appuie sur les trois matières structurantes des affaires publiques à Sciences Po : le droit public, l’économie générale et les finances publiques déclinées en droit de la sécurité intérieure, économie de la sécurité et de la défense et finances publiques de la sécurité et de la défense. Ces trois enseignements comptent parmi les sept enseignements de spécialisation, qui comprennent, en outre, la gestion des risques, la cybersécurité, les politiques publiques de défense et le renseignement.
La spécialité s’articule également avec le lancement concomitant du laboratoire d’innovations publiques (ou Policy Lab), d’où les innovations pédagogiques présentes dans ce parcours : audit sûreté d’un bâtiment de l’Ecole, exercices de simulation de crise, hackathon sur la cybersécurité, entre autres
Plus d’informations sur la filière : http://www.sciencespo.fr/public/fr/content/defense-et-securite